Voyage au cœur des volcans : à la découverte des tunnels de lave du monde

Visites des tunnels de lave du Piton de la Fournaise Volcanoexplorer.re

Voyage au cœur des volcans : à la découverte des tunnels de lave du monde

Qu’est-ce qu’un tunnel de lave ?

Un tunnel de lave (ou lavatube en anglais) est, en termes simples, une grotte formée par une coulée de lave. Lorsque de la lave en fusion s’écoule lors d’une éruption, la surface de la coulée peut refroidir et durcir en formant une croûte solide, tandis que le cœur de la coulée reste liquide et continue de s’écouler sous cette croûte isolante (Définition | Tunnel de lave). Ce processus crée un conduit interne, comme une véritable rivière de lave sous la surface. Quand l’éruption faiblit et que l’alimentation en lave cesse, le conduit se vidange : la lave s’écoule plus loin ou se rétracte vers la source, laissant derrière elle un tunnel vide en forme de galerie.

Ce mécanisme ingénieux est possible surtout avec des laves très fluides, généralement de type basaltique. La fluidité de la lave permet un écoulement sur de longues distances sous une fine croûte. Une image parlante est celle d’une bulle d’air se déplaçant sous une couche de crème figée à la surface d’un chocolat chaud : la “bulle” de lave liquide creuse son chemin sous la croûte refroidie. Une fois la lave évacuée, on peut pénétrer dans ce tunnel naturel et marcher là où s’écoulait il y a peu une coulée incandescente.

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Rando-Volcan.com Bureau Montagne Tunnels de lave Réunion

Volcans boucliers et laves fluides : les volcans qui créent des tunnels

Tous les volcans ne donnent pas naissance à des tunnels de lave. Ces formations sont caractéristiques des volcans effusifs, c’est-à-dire ceux dont les éruptions produisent des coulées de lave fluides (souvent basalte) plutôt que des explosions de cendres. Les volcans boucliers, comme ceux d’Hawaï ou de La Réunion, sont les champions en la matière. Leurs laves de type pāhoehoe (laves « cordées » très fluides) s’étalent en formant de longs tunnels, parfois sur des kilomètres.

En revanche, les volcans à laves plus visqueuses (par exemple certains stratovolcans) forment rarement des tunnels de lave, car leurs coulées se solidifient trop vite et avancent moins loin. Les tunnels de lave sont donc principalement l’apanage des volcans basaltiques qui émettent des coulées rapidement recouvertes d’une croûte isolante. Sous cette croûte, la lave maintient sa chaleur et sa fluidité, creusant son tunnel vers des distances étonnantes.

Comment se forme un tunnel de lave ? Étapes d’une naissance souterraine

formation d'un tunnel de lave

La formation d’un tunnel de lave suit généralement plusieurs étapes clés, observées par les volcanologues :

    1. Écoulement de la lave en surface – Lors d’une éruption effusive, la lave s’épanche en formant des rivières de feu à flanc de volcan. Sur les bords de cette coulée, la lave en contact avec l’air refroidit et durcit, créant des levées (murs de lave solidifiée) sur les côtés du flot de lave. Parfois, la surface de la coulée elle-même commence à se figer en une fine croûte.

    1. Toit de lave et conduit interne – Si l’alimentation en lave est suffisamment abondante et régulière, la fine croûte en surface s’épaissit et s’étend vers le centre de la coulée. Peu à peu, elle recouvre le flot de lave comme un toit. La lave continue de couler en dessous, désormais à l’abri de l’air libre. Ce toit protège la lave interne du refroidissement et permet à l’écoulement de se prolonger loin du volcan, comme dans un tuyau isolé. À ce stade, on a un véritable tube de lave actif : la lave circule à l’intérieur du tunnel en construction.

    1. Vidange et solidification – Lorsque l’éruption s’achève ou que la lave est détournée ailleurs, le flux interne diminue. La lave encore présente dans le conduit s’écoule par gravité vers les parties plus basses, ou bien se rétracte vers le cratère. Parfois, une draination se produit : le tunnel se vide presque totalement de sa lave, ne laissant qu’un plancher lisse (souvent de lave refroidie, appelé pāhoehoe). D’autres fois, le tunnel se vide partiellement, et une rivière de lave en décrue laisse des traces sur les parois – comme le ferait une crue qui baisse dans un tunnel, elle peut déposer des reliefs internes appelés banquettes de lave. Quoi qu’il en soit, la coulée laisse place à une galerie creuse où l’homme pourra s’aventurer.

    1. Effondrements partiels – Avec le temps, certaines portions du toit du tunnel peuvent s’effondrer, soit pendant la formation (si la voûte était trop fine) soit des années plus tard à cause de l’érosion ou de séismes mineurs. Ces ouvertures dans le toit sont appelées lucarnes (skylights) (Définition | Tunnel de lave). Elles créent des entrées naturelles vers le tunnel et laissent entrer de la lumière du jour. Des séries d’effondrements plus importants peuvent même mettre au jour une grande partie de l’ancien tunnel : vu de la surface, cela ressemble à un fossé sinueux, appelé sillon de lave. Mais lorsque le tunnel reste intact sur de longues sections, c’est là que se forment les caves volcaniques spectaculaires que l’on explore aujourd’hui.

Chaque tunnel de lave est unique, mais ce schéma général explique comment naît ce monde souterrain issu du feu. Passons maintenant en revue les plus beaux exemples de tunnels de lave aux quatre coins du globe.

Tour du monde des tunnels de lave les plus spectaculaires

Les tunnels de lave existent dans de nombreuses régions volcaniques. En voici un tour d’horizon, des îles du Pacifique aux déserts d’Afrique, en passant par l’Islande et les tropiques. Chaque site offre un aperçu différent de ces cathédrales souterraines façonnées par la lave.

Hawaï : sous les volcans boucliers du Pacifique

Hawaï, archipel volcanique par excellence, abrite plusieurs tunnels de lave célèbres. Sur la Grande Île (Big Island), les éruptions du volcan Kīlauea ont engendré d’innombrables tubes de lave. Le plus connu d’entre eux est sans doute Kazumura Cave, un tunnel gigantesque qui descend les pentes du Kīlauea. Avec une longueur cartographiée de plus de 65 km, Kazumura est à ce jour le plus long tunnel de lave du monde (Kazumura Cave – Wikipedia). Il s’enfonce jusqu’à 1 102 m de profondeur, record mondial également. Imaginez un tunnel creusé par la lave s’étendant sur l’équivalent d’une heure de route en voiture – le tout entièrement sous terre ! Kazumura est un véritable labyrinthe, comprenant de multiples niveaux et salles. Bien qu’il soit principalement accessible aux spéléologues avertis (et en partie sur terrain privé), sa seule évocation illustre l’extraordinaire ampleur que peuvent prendre les tunnels de lave à Hawaï.

Intérieur d’un tunnel de lave à Hawaï, aux parois arrondies typiques. Ce type de tube s’est formé il y a plusieurs centaines d’années sur les flancs du Kīlauea. (Kazumura Cave – Wikipedia)

Autre site emblématique d’Hawaï : le Thurston Lava Tube, connu localement sous son nom hawaïen Nāhuku (« les protubérances ») (Day Hike- Nāhuku (Thurston Lava Tube) – National Park Service). Situé dans le parc national des volcans d’Hawaï, près du cratère du Kīlauea, ce tunnel de lave vieux de 500 ans a été aménagé pour les visiteurs. Une courte promenade à travers la forêt tropicale mène à l’entrée verdoyante de cette galerie. À l’intérieur, un chemin éclairé permet de marcher aisément dans la fraîcheur humide du tube. Long d’environ 150 m, il offre un échantillon accessible de ce qu’est un tunnel de lave : une voûte arrondie, des parois striées par le passage de l’ancienne coulée et quelques gouttes de lave figées sur le plafond (jadis, de nombreuses stalactites de lave ornaient le plafond, donnant son nom “Nāhuku” au tunnel). La visite, facile et fascinante, est un incontournable du parc national – on y ressent avec émerveillement qu’on marche dans les entrailles d’un volcan.

Enfin, Hawaï nous rappelle que les tunnels de lave ne sont pas que des vestiges du passé. Lors des éruptions récentes du Kīlauea (comme en 2018), des tunnels de lave actifs ont acheminé la lave sur des kilomètres jusqu’à l’océan, alimentant les spectaculaires coulées se jetant dans la mer. Sur l’île voisine de Maui, le volcan Haleakalā possède aussi des tubes de lave, témoignant que l’archipel entier, bâti par des volcans boucliers, regorge de conduits cachés sous la surface.

Islande : grottes volcaniques dans les terres de glace et de feu

L’Islande, île nordique aux volcans actifs, cache elle aussi de nombreux tunnels de lave sous ses champs de lave noirs. L’un des plus connus est Surtshellir, dans l’ouest du pays. Long d’environ 1,6 km, Surtshellir fut le premier tunnel de lave mentionné par les scientifiques (dès le XVIIIe siècle) et longtemps considéré comme le plus long au monde (Surtshellir – Wikipedia). Son nom vient de Surtr, le géant de feu de la mythologie nordique, censé dévaster le monde lors du Ragnarök. Ce nom légendaire donne le ton : pendant des siècles, Surtshellir inspira crainte et fascination. Au Moyen Âge, certains croyaient même que c’était l’antre de bandits ou de créatures infernales. Lorsque vous pénétrez dans Surtshellir, vous découvrez de vastes salles partiellement éclairées par des puits de lumière (des lucarnes naturelles) et, en hiver, des sculptures de glace scintillantes se forment à l’intérieur de la section appelée Íshellir (« grotte de glace »). Ce mélange de feu et de glace fait de Surtshellir un endroit inoubliable.

Non loin de Surtshellir se trouve Víðgelmir, un autre tunnel de lave majeur en Islande. Víðgelmir s’étire sur 1,5 km avec une largeur atteignant 16 m par endroits, ce qui en fait l’une des plus larges galeries de lave accessibles. Ses parois intérieures présentent de superbes couleurs – rouges, orangées et même bleutées – dues aux oxydations et minéraux dans la lave. Des tours guidés y sont proposés, avec éclairage portable, permettant aux visiteurs d’admirer des stalactites de lave délicates et des formations rappelant des draperies figées. Víðgelmir est souvent décrit comme la plus belle grotte de lave d’Islande en raison de ses dimensions et de la richesse de ses formations volcaniques internes.

Près de Reykjavik, un autre site offre une expérience hors du commun : Raufarhólshellir, surnommé The Lava Tunnel. Long d’environ 1 360 m, ce tunnel s’est formé il y a 5 200 ans et présente une galerie principale de près d’un kilomètre de long, haute de 10 m par endroits pour 30 m de large (Raufarhólshellir Lava Tunnel – Arctic Adventures). Autant dire qu’on peut s’y tenir debout sans souci ! Raufarhólshellir est célèbre pour ses jeux de couleurs : la roche basaltique y prend des teintes étonnantes (rouille, ocre, verdâtre) dues aux dépôts minéraux. En hiver, de jolies colonnes de glace se forment près de ses entrées effondrées. Une visite guidée standard vous fait parcourir ce tunnel monumental avec casque et lampe, et même sans être spéléologue, on se sent l’âme d’un explorateur sur Mars en arpentant ce conduit volcanique géant. Accessible en seulement 30 minutes de route depuis la capitale, c’est l’une des excursions volcaniques prisées en Islande.

La Réunion : les galeries secrètes du Piton de la Fournaise

L’île de La Réunion, dans l’océan Indien, est un autre paradis des tunnels de lave. Son volcan actif, le Piton de la Fournaise, dont les éruptions effusives fréquentes recouvrent régulièrement les pentes de coulées, a formé un réseau complexe de tunnels ces dernières décennies. Ici, la lave étant très fluide, chaque grande coulée peut engendrer son tunnel, et certains atteignent des dimensions impressionnantes. Les tunnels de lave de La Réunion comptent d’ailleurs parmi les plus récents et spectaculaires du monde (Découverte de tunnel de lave à La Réunion).

Le plus célèbre est sans doute le Tunnel de la coulée de 2004. Issu de l’éruption d’août 2004 au Piton de la Fournaise, il s’agit du plus grand et du plus long tunnel de lave découvert sur l’île à ce jour. Sur plusieurs kilomètres, ce conduit emmène les visiteurs à la rencontre de merveilles géologiques variées. Au fil de la progression, on peut admirer des plafonds chocolat (couleur brune de la lave refroidie), des parois scintillantes recouvertes de micro-cristaux qui reflètent la lumière, et toute une panoplie de formations uniques. Des cascades de lave figées semblent onduler sur les murs, témoignant du mouvement de la lave avant sa solidification. Par endroits, le plafond s’élève en voûte cathédrale de plus de 6 m de haut, alors qu’ailleurs le visiteur doit s’accroupir pour passer sous une coulée figée suspendue. Ce tunnel, accessible lors d’excursions guidées, offre une expérience immersive inoubliable au cœur du volcan réunionnais – le tout sans effort excessif car il ne nécessite pas de ramping (on peut parcourir la majeure partie debout).

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Explorateurs progressant dans un tunnel de lave à La Réunion. Les lampes frontales révèlent la texture de la paroi, sculptée par l’écoulement de la lave et ornée de stalactites volcaniques. (Guide tunnel de lave – Découvrir les tunnels de lave en sécurité avec un guide

Un autre tunnel intriguant de La Réunion est surnommé le Tunnel Bleu. Comme son nom le suggère, certaines sections de ce tunnel présentent des teintes bleutées mystiques lorsque la lumière des lampes se réverbère sur les parois. Ce phénomène est dû à la composition minérale de la roche et aux reflets de silice sur la surface vitrifiée de la lave. Marcher dans le Tunnel Bleu procure la sensation d’évoluer dans un décor féerique, où la roche noire se pare de reflets bleu-argent sous la lumière. De nombreux photographes en quête d’images surréalistes s’y aventurent pour capter ces couleurs hors du commun.

Outre ces deux-là, l’île compte d’autres tunnels notables, issus d’éruptions plus récentes comme celles de 1998 et 2007. L’accès à ces tunnels est libre mais il est préférable d’engager un guide. Ils sont restés bien préservés. Explorer un tunnel de lave à La Réunion, c’est plonger littéralement dans les entrailles du volcan et observer les traces fraîches de la Fournaise encore actives quelques années auparavant. La géologie prend vie autour de vous : chaque bulle figée, chaque vague pétrifiée sur les murs raconte l’histoire de la coulée qui a créé cet espace. C’est une activité très prisée sur l’île pour les amateurs d’aventure et de volcanologie, accessible même aux non-spéléologues grâce à l’encadrement de guides expérimentés.

Les tunnels de lave de l’Etna : trésors souterrains de Sicile

Le volcan Etna, situé en Sicile, est l’un des volcans les plus actifs au monde. Au fil de ses nombreuses éruptions, il a créé un vaste réseau de tunnels de lave, aussi appelés grottes volcaniques. Ces tunnels se forment lorsque la surface d’une coulée de lave refroidit et durcit, tandis que la lave continue de circuler en dessous. Une fois la lave écoulée, un passage creux reste, comme un tube naturel sculpté par le feu.

Parmi les plus connus figure la Grotta del Gelo, une grotte unique qui abrite un glacier souterrain permanent, une rareté dans un environnement volcanique. D’autres tunnels, comme la Grotta dei Lamponi, la Grotta dei tre livelli ou la Grotta di Serracozzo, sont accessibles via des randonnées ou des visites guidées, offrant un voyage fascinant dans les entrailles du volcan.

Ces formations sont non seulement spectaculaires, mais aussi précieuses pour la recherche scientifique et la préservation du patrimoine naturel sicilien.

Îles Canaries : cavernes volcaniques de l’Atlantique

Les îles Canaries, archipel volcanique au large de l’Afrique, possèdent elles aussi d’extraordinaires tubes de lave. Sur l’île de Tenerife, on trouve la Cueva del Viento (« la grotte du vent »), qui est le plus long tunnel de lave d’Europe. S’étendant sur environ 18 km de galeries souterraines explorées, c’est un véritable labyrinthe sur trois niveaux superposés (Cueva del Viento – Cuevas Turísticas) (La cueva del viento: 18 km de túneles subterráneos en Tenerife que se pueden visitar – Infobae). Formée il y a 27 000 ans par une coulée du volcan Pico Viejo (adjacent au Teide), la Cueva del Viento impressionne tant par sa taille que par sa complexité. Des visites guidées de quelques heures permettent d’en parcourir une partie et d’observer ses formations volcaniques uniques : coulées figées aux formes tourmentées, stalactites de lave et curieux « ponts » entre les étages du labyrinthe. Aucune lumière artificielle n’éclaire l’intérieur, les visiteurs progressent à la lueur de leurs lampes frontales, ce qui rend l’atmosphère encore plus mystérieuse. Le silence y est total, si ce n’est le bruit de vos pas. Ce gigantesque tube a aussi un intérêt biologique : il abrite une faune cavernicole endémique (insectes et araignées adaptées à l’obscurité). La Cueva del Viento est classée comme l’un des plus grands tunnels volcaniques du monde et offre un voyage souterrain digne d’un roman de Jules Verne 

Sur l’île de Lanzarote, un autre tunnel de lave attire des visiteurs du monde entier : le Tunnel de La Corona, formé par le volcan Monte Corona. Ce tube s’étend sur plus de 7 km, dont une partie sous la mer (le Tunnel de l’Atlantide, section sous-marine de 1,5 km, est l’un des plus longs tunnels de lave subaquatiques connus). À terre, la portion accessible de ce tunnel inclut la célèbre Cueva de los Verdes. La Cueva de los Verdes propose un parcours aménagé d’environ 2 km à travers de superbes galeries illuminées. Les éclairages artistiques y mettent en valeur les reliefs de la roche et créent un jeu d’ombres et de lumières envoûtant, faisant ressortir les teintes rouges et vertes des parois. Historiquement, cette grotte servit de refuge aux habitants de Lanzarote contre les attaques de pirates aux XVIᵉ et XVIIᵉ siècles (CUEVA DE LOS VERDES (Lanzarote) – Qué SABER antes de ir …) (Descubre la increíble Cueva De Los Verdes – Lanzarote.com). S’y cacher était facile tant le labyrinthe est obscur : même avec des flambeaux, les pirates téméraires s’y perdaient facilement. Aujourd’hui, lors de la visite, les guides racontent ces anecdotes et réservent une surprise acoustique aux touristes en démontrant l’excellente résonance d’une salle utilisée comme auditorium naturel. Juste en dessous de la Cueva de los Verdes se trouvent les Jameos del Agua, autre segment du tunnel effondré en plusieurs points, où l’artiste César Manrique a aménagé un site magique avec un lac souterrain peuplé de minuscules crabes blancs aveugles. Lanzarote montre ainsi toute la diversité de ce qu’un tunnel de lave peut offrir : de l’aventure brute à la mise en scène artistique.

Les autres îles des Canaries ne sont pas en reste. La Palma, El Hierro ou Gran Canaria possèdent aussi des tubes de lave plus modestes, souvenirs de leurs éruptions passées. Par exemple, La Cueva del Tendal à La Palma ou Simão Lopes à El Hierro. Cependant, Tenerife et Lanzarote restent les destinations phares pour qui veut explorer des tunnels de lave dans l’archipel.

Les tunnels de lave des Açores : merveilles volcaniques de l’Atlantique

Situés au cœur de l’océan Atlantique, les Açores sont un archipel volcanique portugais où la nature a façonné des paysages spectaculaires — y compris d’impressionnants tunnels de lave. Ces formations souterraines se sont créées lors d’éruptions anciennes, lorsque la lave a continué de couler sous une croûte refroidie, laissant derrière elle des galeries naturelles.

Le plus célèbre d’entre eux est la Gruta das Torres, sur l’île de Pico. Long de près de 5 kilomètres, c’est le plus grand tube de lave connu au Portugal. À l’intérieur, on peut admirer des stalactites de lave, des parois vitrifiées, et une ambiance mystérieuse, presque lunaire.

Ces tunnels offrent une fenêtre unique sur l’histoire volcanique des Açores et sont aujourd’hui protégés et ouverts à la visite, dans le respect de leur écosystème fragile.

🌋 Les tunnels de lave de Madère : voyage au cœur de l’île volcanique

L’île de Madère, au large du Portugal, est d’origine volcanique. Parmi ses trésors souterrains se trouvent les tunnels de lave de São Vicente, formés il y a environ 890 000 ans lors d’une éruption. Ces tunnels sont le résultat de coulées de lave qui ont creusé des galeries naturelles en refroidissant.

Aujourd’hui, une partie de ce réseau est accessible au public grâce au Centre de volcanisme de São Vicente, un site interactif et éducatif qui permet aux visiteurs de marcher à travers environ 1 km de galeries, tout en découvrant les origines volcaniques de l’île.

Entre roches noires, formations étonnantes et ambiance mystérieuse, ces tunnels offrent un voyage fascinant au cœur de la terre de Madère.

Galápagos : tunnels sous l’archipel des tortues géantes

Les îles Galápagos, célèbres pour leur faune unique, recèlent également des tunnels de lave fascinants. Sur l’île de Santa Cruz, plusieurs tunnels de lave traversent les hauts plateaux humides. L’un des plus connus se situe près de la ferme d’El Chato, souvent inclus dans les circuits touristiques après l’observation des tortues géantes. Là, une promenade souterraine d’une trentaine de minutes vous mène à travers un large tunnel de lave presque parfaitement circulaire, haut de 5 à 6 mètres. Des lumières installées balisent le chemin, mais l’expérience reste authentique : on y avance quasiment seul, dans la fraîcheur, avec parfois la surprise de voir un hibou des Galápagos (une chouette effraie locale) niché dans une cavité du plafond. Ces rapaces ont trouvé refuge dans les tunnels, profitant de la tranquillité et de l’obscurité le jour.

D’autres tunnels sur Santa Cruz ou l’île d’Isabela sont plus sauvages, sans éclairage, et l’on peut s’y aventurer avec un guide. La roche basaltique y prend des reflets argentés sous la lampe torche, et l’on peut observer des racines d’arbres perçant le plafond et descendant chercher l’humidité dans la cavité – un spectacle impressionnant qui rappelle que la jungle est juste au-dessus. Les tunnels de lave des Galápagos ne sont pas les plus longs du monde (quelques centaines de mètres à 1 ou 2 km tout au plus), mais ils offrent un contraste bienvenu avec la chaleur de la surface. Après avoir marché sous le soleil équatorial, pénétrer dans un tunnel de lave procure une sensation de climatisation naturelle et un petit frisson d’aventure, comme si l’on partait sur les traces de Darwin à la découverte d’un écosystème caché.

Afrique de l’Est : volcans du Rift et cavernes oubliées

Le grand Rift africain, avec ses volcans boucliers, a lui aussi engendré des tunnels de lave, quoique moins connus du grand public. En Éthiopie, dans la dépression de l’Afar, les volcans basaltiques comme Erta Ale ou les champs volcaniques du plateau éthiopien ont produit des coulées où des tubes de lave se sont formés. Ces tunnels sont peu explorés en raison des conditions difficiles (chaleur extrême, isolement) mais certaines expéditions de spéléologues ont rapporté l’existence de galeries pouvant atteindre plusieurs centaines de mètres dans les coulées anciennes. On imagine sans peine l’ambiance d’un tel lieu : une chaleur moite, l’odeur de soufre parfois présente, et un silence seulement troublé par quelques gouttes d’eau percolant depuis la surface aride.

Plus au sud, au Kenya, le volcan Suswa offre un réseau de tunnels de lave remarquable. Suswa est un volcan bouclier dont l’éruption ancienne a laissé un labyrinthe de tubes courant sur plus de 7 km sous les pentes. Particularité de Suswa : certains tunnels y forment deux étages superposés. Il existe des portions où un tunnel inférieur et un tunnel supérieur cohabitent, avec des puits reliant les deux – un peu comme un immeuble à deux niveaux, mais naturel. Ces ouvertures servent de cheminées d’aération, et de façon insolite, une colonie de babouins utilise l’un des grands effondrements comme abri : on surnomme cette caverne ouverte le « Parlement des babouins », car on y trouve souvent des dizaines de singes assis sur les rochers, semblant tenir conseil à l’abri des prédateurs la nuit tombée. Pour les Massai locaux, ces grottes de Suswa sont empruntes de mystère et font partie de leur paysage culturel.

En République démocratique du Congo, des tunnels de lave existent également autour du volcan Nyiragongo (bien connu pour son lac de lave), et en Algérie, l’ancienne activité volcanique du Hoggar a laissé quelques tubes. Cependant, faute de tourisme structuré, ces sites restent largement confidentiels.

L’Afrique de l’Est demeure un terrain d’exploration pour les vulcanologues et spéléologues, et qui sait quelles surprises les tunnels de lave africains nous réservent ?

Australie : les tubes de lave du Queensland

L’Australie, bien que moins volcanique aujourd’hui, conserve dans sa terre les traces de spectaculaires tunnels de lave. Dans le nord du Queensland, le volcan Undara (qui fit éruption il y a ~190 000 ans) a produit l’une des plus longues coulées de lave de la planète, atteignant près de 160 km de long (Undara | Volcano World – Oregon State University) (LAVA TUBES – Earth Science Australia). Cette coulée gigantesque s’est en grande partie creusée en tunnel. Avec le temps, le toit s’est effondré par endroits, découpant le tube originel en plusieurs segments de grotte. Malgré cela, certaines sections demeurent intactes et accessibles, protégées au sein de l’Undara Volcanic National Park. Les Undara Lava Tubes forment ainsi le plus vaste système de tunnels de lave d’Australie, et parmi les plus étendus au monde.

Ce qui frappe à Undara, c’est la taille des galeries. Par exemple, la caverne dite The Archway possède une voûte de 20 m de haut pour 20 m de large, assez vaste pour y loger un immeuble ! On y avance dans un couloir naturel imposant, où la végétation tropicale a envahi les portions effondrées (de véritables jungles sous-terre aux entrées de chaque segment de tube). Un autre tronçon célèbre, Bayliss Cave, s’enfonce sur plus d’un kilomètre dans la pénombre totale. C’est un des habitats de chauves-souris les plus importants d’Australie : des milliers de chauves-souris insectivores y nichent, remplissant la grotte de cris aigus et d’odeurs musquées. Les visiteurs, accompagnés de rangers, peuvent observer ces créatures fascinantes en pleine obscurité, une expérience digne d’un film d’aventure. À la saison humide, attention où vous mettez les pieds : de petites mares peuvent subsister sur le sol du tunnel, et elles abritent parfois des micro-organismes fluorescents ou de minuscules crustacés aveugles, témoignant d’un écosystème unique. Undara prouve que même longtemps après l’extinction d’un volcan, ses tunnels de lave continuent d’abriter la vie et d’émerveiller par leur gigantisme.

États-Unis continentaux : trésors souterrains de l’Ouest américain

En dehors d’Hawaï, le territoire continental des États-Unis possède également de nombreux tunnels de lave, notamment dans l’Ouest volcanique. Dans l’État de Washington, au pied du volcan Mount St. Helens, s’étend Ape Cave, l’un des plus longs tubes de lave d’Amérique du Nord. Formé il y a environ 2000 ans par une coulée basaltique, Ape Cave mesure plus de 3 km de long. Il est aisément visitable : une partie inférieure assez plate de ~1,5 km peut se parcourir à pied aller-retour, tandis qu’une portion supérieure plus difficile (avec éboulis et ressauts) offre un défi aux aventuriers. Son nom provient d’une légende locale où des créatures poilues (surnommées “apes”, singes, en référence à Bigfoot) auraient été aperçues près de la grotte dans les années 1950. L’exploration d’Ape Cave est un voyage dans un noir absolu : si l’on éteint sa lampe, on ne voit plus sa main devant son visage. Les parois de la caverne montrent des textures de lave cordée et des traces de diversification du flot (on y distingue des coulées internes plus récentes figées sur d’anciennes). En hiver, des colonnes de glace se forment près de l’entrée, offrant un contraste saisissant avec la roche volcanique.

Plus au sud, en Californie, le parc national de Lava Beds protège plus de 700 grottes volcaniques, pour la plupart des tunnels de lave issus d’éruptions vieilles de 30 000 à 40 000 ans. Ces tunnels se trouvent dans un haut-plateau aride et se présentent souvent sous forme de tubes courts (quelques centaines de mètres) mais nombreux et proches les uns des autres. Parmi eux, on peut citer Valentine Cave, Mushpot Cave (éclairée pour le public) ou Skull Cave. Chacun a ses particularités : Mushpot offre des panneaux explicatifs et une initiation douce aux tubes de lave, Skull Cave possède un puits intérieur au fond duquel subsiste de la glace toute l’année, et Valentine Cave présente de belles striations horizontales sur les murs indiquant les anciens niveaux de lave (Lava tube – Wikipedia). L’ambiance à Lava Beds est très différente d’Hawaï ou de La Réunion : ici pas de végétation luxuriante aux entrées, mais une steppe aride où seules quelques herbes et genévriers résistent, pourtant la fraîcheur des tunnels abrite parfois des animaux comme des chauves-souris, des crapauds ou des insectes troglodytes. C’est un terrain de jeu idéal pour les amateurs de spéléologie débutants, avec un carnet de grottes à cocher en toute autonomie.

D’autres régions des États-Unis possèdent des tunnels de lave : le champ volcanique de Craters of the Moon en Idaho compte également plusieurs tubes (dont Indian Tunnel, large et partiellement effondré, que l’on parcourt comme un dédale éclairé par de vastes lucarnes). Au Nouveau-Mexique, le parc d’El Malpaís (« la mauvaise terre », un désert de lave) renferme aussi des tunnels accessibles, comme Big Tubes. L’Oregon, l’Arizona et d’autres états de l’Ouest comportent des coulées basaltiques récentes avec leurs tubes, bien que moins connus.

Ainsi, du nord au sud de la côte ouest américaine, il est possible de partir à la rencontre de ces mystérieuses galeries créées par la lave. Chacun offre un décor et une atmosphère particulière, mais tous procurent cette émotion de marcher dans les pas d’une coulée ardente aujourd’hui figée.

Corée du Sud : Trésors souterrains de l’île de Jeju

Les tunnels de lave de Jeju, également appelés tubes de lave de l’île de Jeju, sont un réseau spectaculaire de formations volcaniques situées sur l’île de Jeju, au sud de la Corée du Sud. Ces tunnels ont été formés il y a des milliers d’années lors d’éruptions volcaniques du mont Hallasan, un volcan bouclier situé au centre de l’île.

Caractéristiques principales des tunnels de Jeju :

  • Manjanggul (만장굴) : C’est l’un des tubes de lave les plus célèbres et visités de l’île. Il mesure environ 13,4 km de long, bien que seule une partie (environ 1 km) soit ouverte au public.

  • Température constante : Les tunnels gardent une température de 11 à 21°C tout au long de l’année, ce qui les rend agréables à visiter même pendant les fortes chaleurs.

  • Structures fascinantes : On peut y observer des stalactites et stalagmites de lave, des colonnes de lave, ainsi que des formes ondulées dues au mouvement de la lave.

  • Site inscrit au patrimoine mondial : Le réseau de tubes de lave de Jeju, avec le mont Hallasan et le cône volcanique Seongsan Ilchulbong, est inscrit à la liste du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2007.

Les tunnels de lave de Jeju sont parmi les plus longs, les mieux conservés et les plus spectaculaires au monde. Ils offrent un aperçu rare de l’activité volcanique ancienne et de la façon dont la nature façonne des paysages souterrains impressionnants.

À l’intérieur d’un tunnel de lave : aventure, sensations et vie cachée

Explorer l’intérieur d’un tunnel de lave est une aventure sensorielle unique. Dès les premiers mètres, on quitte la lumière du jour pour pénétrer dans un monde obscur où nos repères changent. Que peut-on ressentir et découvrir à l’intérieur de ces tubes volcaniques ?

 

    • L’obscurité totale et le silence : En éteignant votre lampe au cœur d’un tunnel, vous faites l’expérience d’une obscurité absolue, un noir d’encre que l’on ne trouve presque jamais à l’air libre. Le silence y est tout aussi frappant – une fois immobile, on n’entend souvent rien d’autre que le faible écho de gouttes d’eau ou le battement de son propre cœur. Cette ambiance peut être à la fois apaisante et intimidante. Beaucoup de visiteurs décrivent un sentiment d’humilité face à cette tranquillité souterraine, comme si le temps s’arrêtait. D’autres sentent l’adrénaline monter, conscients d’être sous des tonnes de roche volcanique, dans un lieu où la lumière du soleil ne pénètre pas.

    • Des formations géologiques étonnantes : La nature a sculpté l’intérieur des tunnels de lave avec une créativité sans limites. En levant les yeux, on peut apercevoir de petites stalactites de lave figées, appelées parfois lavacicles, formées par des gouttelettes de lave qui ont refroidi en pendentifs pointus. Au sol, on trouve parfois leur pendant, de petites excroissances ou stalagmites de lave, créées par l’égouttement de lave depuis le plafond (bien plus rares que dans les grottes calcaires, mais présentes dans certains tunnels comme à Cueva del Viento ou Kazumura). Les parois affichent des entrailles de volcan figées : on observe des coulées internes vernissées qui ont re-tapissé le sol, des banquettes sur les côtés marquant d’anciens niveaux de lave (comme les anneaux dans une baignoire vidangée), et des reliefs curieux nommés gouttières ou rideaux de lave, là où la lave a coulé en mince draperie le long d’une paroi avant de durcir. Chaque recoin mérite de s’attarder, car ces formes racontent la dynamique de la lave qui a circulé là, tel un livre ouvert pour qui sait le déchiffrer.

    • Couleurs et lumières : Contrairement à l’idée que l’intérieur d’un volcan serait uniformément noir, les tunnels de lave peuvent présenter des couleurs variées. La roche basaltique elle-même est généralement gris très sombre, presque noire, mais elle peut être recouverte de dépôts minéraux colorés. Le fer donne des teintes rouges ou orangées par oxydation (on voit souvent des rouilles rouge brique sur les plafonds). Le soufre peut laisser des traces jaunâtres. La silice et le calcium peuvent dessiner un voile blanc sur certaines parois. Et puis il y a l’effet de la lumière artificielle : les éclairages de torche LED révèlent des reflets bleutés ou violets sur les surfaces vitrifiées de la lave. C’est ce qui donne notamment le charme au Tunnel Bleu de La Réunion ou à certaines salles de Víðgelmir en Islande – un scintillement bleuté fantomatique lorsque l’on balaie la lampe sur la voûte. Par endroits, si une ouverture existe vers l’extérieur (lucarne), un rayon de soleil peut s’infiltrer, créant un cône de lumière dramatique dans la poussière en suspension. Ces moments offrent des images spectaculaires dignes d’un décor de film d’aventure.

    • Faune et flore souterraines : Même dans un environnement aussi extrême, la vie trouve souvent un chemin. Bien sûr, on est loin de la biodiversité d’une grotte calcaire avec ses salamandres ou ses poissons aveugles, car les tunnels de lave sont relativement jeunes et pauvres en eau. Mais on peut tout de même y croiser quelques habitants. Les chauves-souris sont fréquentes dans de nombreux tunnels (par exemple à Undara en Australie ou à Lava Beds en Californie). Elles y trouvent un refuge frais pour la journée, accrochées au plafond dans les sections calmes. Des insectes spécialisés arpentent les ténèbres : on a découvert dans Kazumura à Hawaï des espèces de papillons de nuit troglobies (adaptées au milieu souterrain) inconnues ailleurs (Kazumura Cave – Wikipedia). Des araignées, des coléoptères et des cloportes endémiques peuplent la Cueva del Viento à Tenerife, profitant des matières organiques apportées par l’extérieur (feuilles, fientes de chauve-souris…). Aux entrées des tunnels, là où pénètre un peu de lumière, un mini-écosystème verdoyant s’installe : fougères, mousses, racines pendantes d’arbres formant des “rideaux” vivants, et parfois même de petits arbustes profitent de l’humidité du tunnel tout en recevant la lumière du jour par la lucarne. C’est le cas par exemple à l’entrée de Thurston Lava Tube à Hawaï, où la végétation luxuriante forme un véritable porche de jungle, contrastant avec l’intérieur nu de la grotte.

    • Sensations physiques et émotionnelles : Marcher sous terre dans un tunnel de lave procure des sensations mixtes. D’un côté, il y a la sérénité du lieu : température souvent fraîche et stable (autour de 15 °C dans beaucoup de tunnels tropicaux, ce qui repose du climat extérieur chaud), pas de vent, un sol relativement plat sur lequel on avance lentement en observant chaque détail. D’un autre côté, c’est aussi une montée d’adrénaline : chaque virage sombre que l’on franchit peut révéler une nouvelle surprise, chaque bruit inconnu (une goutte d’eau qui tombe, une pierre qui roule) fait sursauter nos sens en alerte. On ressent aussi une connexion intime avec la Terre. Se dire que l’on chemine à l’intérieur même d’une coulée de lave figée invite à l’humilité et à la réflexion sur la puissance des volcans. Certains visiteurs décrivent un sentiment quasi spirituel, une émotion particulière en touchant de la main ces parois lisses en pensant qu’ici coulait du magma en fusion quelques centaines ou milliers d’années auparavant. C’est littéralement un voyage “au centre de la Terre” à échelle humaine, qui laisse des souvenirs impérissables.

    • Sécurité et précautions : L’exploration d’un tunnel de lave, comme toute sortie souterraine, requiert un minimum de précautions. La première est de ne pas s’aventurer seul ni sans équipement adéquat. Une lampe puissante (idéalement une frontale pour garder les mains libres) et un casque de protection sont indispensables. Le casque protègera votre tête des chocs contre le plafond (qui peut être bas par endroits) et d’éventuelles petites chutes de pierres. Il faut aussi de bonnes chaussures, car le sol peut être inégal, couvert de rochers ou de coulées aux reliefs irréguliers (certaines laves forment des surfaces très coupantes appelées lave ʻaʻā, qu’on évite généralement dans les tunnels touristiques, mais mieux vaut être bien chaussé). Enfin, il est prudent d’avoir une seconde source de lumière sur soi (lampe de secours) en cas de panne de la première – l’obscurité totale n’offre aucune option si votre seule lampe vous lâche !

En somme, pénétrer dans un tunnel de lave, c’est un peu comme entrer dans une capsule temporelle naturelle, où l’on peut lire sur les murs le récit d’une éruption passée. C’est une aventure à la fois scientifique (comprendre comment la lave a façonné ce lieu), sensorielle (évoluer dans un milieu hors du commun) et personnelle (surmonter l’appréhension de la noirceur et du confinement pour en ressortir émerveillé).

Ce qui les rend fascinants : mystères, légendes et beauté intérieure

Qu’est-ce qui rend les tunnels de lave si fascinants aux yeux du public comme des scientifiques ? Plusieurs aspects se conjuguent pour donner à ces cavernes volcaniques un attrait unique.

Des formes et structures uniques – Contrairement aux grottes calcaires décorées de stalactites de calcite translucide, les tunnels de lave offrent des formes que l’on ne voit nulle part ailleurs. Le fait qu’ils résultent d’un liquide en mouvement se lit dans chaque détail : coulées figées en cascades, bourrelets de lave rappelant des vagues, cordes de lave entremêlées sur le sol comme les fibres d’un tapis. Certains tunnels ont des étages multiples (plusieurs conduits empilés) résultat de différentes pulsations de l’éruption – un phénomène absent des grottes classiques. On trouve aussi des puits verticaux à l’intérieur des tunnels, vestiges d’anciennes chutes de lave en cascade entre deux niveaux de tube. Ces puits forment parfois de magnifiques colonnes intérieures, comme un trou parfaitement cylindrique traversant le plafond, ajoutant au caractère labyrinthique. Les tunnels de lave conservent également les traces de la violence originelle du volcan : on peut voir des zones vitrifiées où la roche a subi un refroidissement ultra-rapide, ou au contraire des couches de matière plus cristalline là où la lave a stagné un peu plus longtemps. Cette variété fait de chaque pas dans le tunnel une découverte : on passe d’une salle large à un passage bas, puis à une galerie annexe qui fait un coude serré… L’exploration a un côté ludique et plein de surprises, presque comme un parcours d’aventure.

Un kaléidoscope de couleurs naturelles – Comme évoqué précédemment, les tunnels de lave ne sont pas uniformément noirs. La palette de couleurs, bien que plus subtile que dans une grotte ornée artificiellement, surprend souvent le visiteur. Outre le noir et le gris de base, on y rencontre le brun chocolat, le rouge vif (fer oxydé, visible par exemple sur les plafonds du tunnel 2004 à La Réunion), le blanc laiteux de certains minéraux, le jaune soufre, le vert mousse aux entrées, et même le bleu métallique sur les parois vitrifiées (donnant son nom au Tunnel Bleu). Cette dernière teinte résulte de la diffraction de la lumière sur d’infimes particules de silice et peut transformer une banale paroi en véritable œuvre d’art naturelle lorsque le spot du guide l’éclaire sous le bon angle. Certains tunnels comme Benbow Cave sur le volcan Ambrym (Vanuatu) sont connus pour avoir des dépôts d’ardoise ou de minéraux qui reflètent la lumière en arcs-en-ciel – on se croirait dans une galerie de cristal. Ces merveilles colorées, bien que discrètes, contribuent à l’enchantement du lieu.

Entre science et mythe – Les tunnels de lave ont alimenté l’imaginaire collectif. Dans les cultures polynésiennes d’Hawaï, on raconte que la déesse volcanique Pele voyage sous terre à travers des tunnels de lave pour se rendre d’un cratère à l’autre. Ainsi, entrer dans un tunnel de lave pouvait être vu comme pénétrer le domaine de Pele, un lieu sacré et potentiellement dangereux. En Islande médiévale, Surtshellir était craint : on le pensait hanté par des êtres maléfiques ou relié aux événements du Ragnarök (la fin du monde dans la mythologie nordique). Les bergers évitaient de s’en approcher après la tombée de la nuit. Aux Canaries, la Cueva de los Verdes était auréolée de mystère : on chuchotait qu’un trésor y était caché, ou qu’un dragon y dormait, sans doute pour décourager les explorateurs imprudents.

Au-delà des légendes, ces tunnels ont servi à l’homme de manière concrète : refuges anti-pirates à Lanzarote, abris temporaires lors d’éruptions (certains habitants de La Réunion se sont réfugiés dans des tunnels durant des épisodes volcaniques imprévus, la couche de roche offrant une bonne protection thermique), ou encore abris anti-atomiques pendant la Guerre froide (un segment de Kazumura à Hawaï fut un temps équipé comme abri en cas d’attaque nucléaire (Kazumura Cave – Wikipedia)). Chaque tunnel célèbre a son histoire : Thurston Lava Tube doit son nom à Lorrin Thurston, un éditeur de journal qui l’a “découvert” en 1913 en suivant la lueur d’une bougie qui s’éteignait dans un trou (signe de courant d’air d’une cavité) ; Surtshellir a été exploré systématiquement par des érudits islandais dès 1750, ce qui en fait la première grotte volcanique décrite scientifiquement (Surtshellir – Wikipedia) (Surtshellir – Wikipedia) ; la Cueva del Viento à Tenerife a livré des fossiles d’animaux préhistoriques, piégés là après être tombés dans un trou ; et ainsi de suite. Ces anecdotes donnent vie aux cavernes et piquent la curiosité de chacun.

Défis et exploits humains – La fascination vient aussi du fait que ces tunnels représentent des défis pour les explorateurs. Pendant longtemps, la longueur de certains est restée inconnue. Les spéléologues du monde entier partent en expédition pour cartographier ces conduits parfois exigus et complexes. Le record de Kazumura à plus de 65 km n’a pas été établi en un jour : il a fallu des années d’exploration, de 1960 aux années 1990, pour connecter des segments et comprendre l’étendue énorme du réseau (Kazumura Cave – Wikipedia). De même, la Cueva del Viento voit régulièrement de nouvelles galeries découvertes, prolongeant son développement. Ce côté exploration géographique (il reste des zones blanches sur la carte sous nos pieds) ajoute une aura d’aventure scientifique. Pour le grand public, visiter un tunnel de lave guidé par un spécialiste qui a lui-même rampé dans des conduits étroits pour en relever le plan suscite admiration et respect – on est loin de la promenade anodine. C’est un peu comme marcher sur la Lune guidé par un astronaute : on foule un sol inconnu accompagné de ceux qui l’ont conquis. Cette conquête pacifique du monde souterrain passionne les esprits curieux et donne envie d’en savoir plus.

En résumé, les tunnels de lave combinent beauté naturelle, mystère historique et intérêt scientifique, ce qui les rend absolument fascinants. Ils sont à la croisée des chemins entre la géologie pure et le monde de l’aventure. Nul étonnement que de plus en plus de voyageurs souhaitent les explorer, lampe en main et casque sur la tête, pour vivre un moment hors du temps sous la surface terrestre.

logo tunnels de lave Volcanoexplorer.re Piton de la Fournaise Réunion
Rando-Volcan.com Bureau Montagne Tunnels de lave Réunion

Conseils pratiques pour les visiteurs de tunnels de lave

Si cette lecture vous a donné envie de partir explorer un tunnel de lave, sachez qu’avec un peu de préparation et de prudence, c’est une activité tout à fait accessible et enrichissante. Voici quelques conseils pratiques pour profiter au mieux de cette expérience en toute sécurité :

1. Renseignez-vous et choisissez un tunnel adapté – Il existe des tunnels de lave de différents niveaux de difficulté. Certains sont aménagés et éclairés (comme le Thurston Lava Tube à Hawaï ou la Cueva de los Verdes à Lanzarote), d’autres sont sauvages mais assez faciles d’accès avec un guide (Tunnel 2004 à La Réunion, Raufarhólshellir en Islande), tandis que certains nécessitent de véritables compétences de spéléologie (crawling prolongé, orientation dans un labyrinthe, etc.). Pour une première expérience, privilégiez un tunnel touristique ou accompagné d’un guide professionnel. Les sites officiels des parcs nationaux ou des offices de tourisme locaux fournissent généralement des informations sur les possibilités de visite. Par exemple, la Cueva del Viento à Tenerife n’est accessible qu’en visite guidée sur réservation (places limitées), Ape Cave aux USA est libre d’accès mais il faut retirer un permis gratuit en ligne et apporter son éclairage, etc. Bien choisir son lieu vous permettra d’être plus à l’aise et de profiter sans stress.

2. Faites-vous accompagner par un guide expérimenté – S’aventurer seul dans un tunnel de lave que l’on ne connaît pas est fortement déconseillé. Un guide expérimenté apporte non seulement la sécurité (connaissance du réseau, des éventuels passages délicats, des comportements à éviter) mais aussi la richesse des explications. Il saura vous montrer les points d’intérêt, vous expliquer la formation géologique du tunnel, et adapter le parcours à votre niveau (Guide tunnel de lave – Découvrir les tunnels de lave en sécurité avec un guide). À La Réunion par exemple, plusieurs sociétés proposent des excursions guidées dans les tunnels de la Fournaise : le guide fournit casques et lampes, et partage sa passion du volcan tout au long de la visite. Idem en Islande ou aux Canaries, où des tours encadrés existent. Le coût d’un guide vaut la peine pour une expérience sereine et instructive. Si vous explorez sans guide (par exemple dans un parc national américain où l’auto-exploration est permise), ne partez jamais seul : formez un petit groupe, et indiquez à une personne extérieure où vous allez et à quelle heure vous comptez ressortir. La règle d’or de la spéléologie s’applique : trois personnes minimum, ainsi en cas de problème, l’une peut rester auprès d’une personne blessée pendant que l’autre va chercher du secours.

3. Équipez-vous correctement – Dans un tunnel de lave, vous aurez besoin d’équipement de base. Le minimum : un casque solide (type casque de chantier ou d’escalade) et une lampe frontale fixée dessus, plus une lampe de rechange (ou des piles supplémentaires). Habillez-vous avec des vêtements qui peuvent être salis ou frottés contre la roche : pantalon long et manches longues de préférence, car la roche volcanique peut être abrasive. Prévoyez des gants de protection si vous devez marcher à quatre pattes ou soutenir votre appui sur les parois (cela évite de se couper sur des aspérités tranchantes et protège aussi les formations fragiles de la graisse des mains humaines). Des chaussures de randonnée ou baskets robustes avec une bonne semelle sont essentielles – oubliez les tongs ou chaussures de ville, le sol peut être glissant ou irrégulier. En fonction de la durée et de la température annoncée, prenez un petit sac à dos avec de l’eau et peut-être un encas. La température intérieure étant stable, il fait souvent frais : une petite laine est bienvenue, surtout si vous restez immobile un moment sous terre pour écouter le silence ou faire des photos. Enfin, ne pas oublier que le port du masque peut être demandé dans certaines grottes si des chauves-souris y vivent, afin de prévenir la transmission de maladies (par exemple, aux USA, on sensibilise les visiteurs au syndrome du nez blanc qui décime les chauves-souris et peut être propagé par les humains d’une grotte à l’autre).

4. Respectez le milieu – Les tunnels de lave sont des environnements fragiles. Même s’ils sont faits de roche dure, beaucoup d’éléments à l’intérieur peuvent être endommagés par une action inconsidérée. Ne touchez pas aux stalactites de lave ou autres spéléothèmes : ces formations ont mis du temps à se constituer et sont rares, un simple effleurement peut les casser ou les encrasser. Suivez toujours le sentier indiqué ou les pas du guide pour éviter d’abîmer des zones intactes du sol (il peut y avoir des dépôts fins, des cristaux ou des traces paléontologiques au sol sans que vous le sachiez). Ne laissez aucun déchet derrière vous, évidemment. Il est tentant d’allumer un bout de journal ou de faire du feu pour “voir comme autrefois”, mais c’est à proscrire absolument : la fumée stagnerait et pourrait vous asphyxier, et le dépôt de suie noircirait définitivement les plafonds. Préférez les lampes électriques. Dans certains tunnels très visités, on vous demandera de ne pas parler trop fort ou crier, afin de préserver la quiétude (et les chauves-souris) – par exemple dans certaines portions de la Cueva del Viento. En résumé, adoptez l’attitude d’un invité respectueux dans la maison du volcan.

5. Prêtez attention à la sécurité – La plupart des accidents en tunnel de lave surviennent par glissade ou chute. Marchez prudemment, en particulier sur les rochers instables dans les sections effondrées ou sur les pentes de débris. Testez les prises avant de vous appuyer. Si un passage semble trop étroit ou difficile pour vous, n’hésitez pas à le signaler et à faire demi-tour si nécessaire – ne forcez jamais vos limites dans un milieu confiné. Vérifiez la météo s’il y a des ouvertures : en cas de forte pluie, certains tunnels peuvent voir de l’eau s’infiltrer rapidement (surtout les tunnels jeunes peu profonds). Évitez absolument de pénétrer dans un tunnel de lave lorsqu’une éruption est en cours sur le volcan concerné – cela paraît évident, mais il faut le rappeler : un tunnel actif transportant de la lave est totalement infranchissable (chaleur mortelle, gaz toxiques) et même un tunnel d’une coulée précédente pourrait dégager des gaz ou subir des secousses. Tenez-vous-en aux tunnels des coulées anciennes, déclarés sans danger par les autorités locales. Enfin, soyez conscient des éventuels vertiges ou claustrophobie : la plupart des gens se sentent bien dans les tunnels spacieux, mais certaines sections peuvent être étroites ou basses de plafond. Si vous êtes sujets à l’anxiété en espace confiné, informez-en votre guide pour qu’il évite ces passages ou vous prépare mentalement (généralement, on fait une pause, on respire calmement, et l’on garde à l’esprit que l’entrée n’est pas loin et qu’on peut rebrousser chemin rapidement – visualiser cela aide à surmonter le petit stress).

6. Profitez pleinement de l’expérience – Dernier conseil, et non des moindres : prenez le temps de déguster l’instant sous terre. L’exploration d’un tunnel de lave n’est pas une course, mais une immersion. Laissez votre curiosité vous guider : observez les détails des murs, éteignez la lampe quelques secondes pour ressentir la grotte, écoutez le guide raconter l’histoire du lieu, essayez d’imaginer la lave en train de couler autour de vous il y a des années… Ces moments d’émerveillement sont le but même de la visite. N’hésitez pas à poser des questions, à prendre des photos (en respectant les consignes, souvent la photographie sans flash est autorisée et même encouragée pour capturer l’ambiance naturelle). Gardez à l’esprit que vous vivez quelque chose d’un peu hors du commun que peu de gens expérimentent, alors faites-en une aventure personnelle mémorable.


Les tunnels de lave, longtemps méconnus, s’ouvrent aujourd’hui de plus en plus aux amateurs d’aventure et de nature. Que ce soit en arpentant un passage illuminé à Hawaï, en rampant dans un boyau sauvage de La Réunion, ou en admirant un puits de lumière perçant l’obscurité islandaise, on ressort toujours enchanté de cette exploration singulière. Ces galeries volcaniques sont les témoins silencieux des forces titanesques qui agitent notre planète, et y pénétrer, c’est toucher du doigt ces forces en toute sécurité.

Alors, lors de votre prochain voyage sur une terre volcanique, pensez à ajouter à votre itinéraire une excursion sous la surface. Car sous vos pieds se cache peut-être un monde secret, façonné par le feu, prêt à vous révéler ses merveilles et à vous faire vivre une véritable aventure au centre de la Terre.

Bon voyage sous les volcans !